Carte des chemins royaux des Cévennes – Nolin 1703 – Carte de la révolte des protestants contre le pouvoir royal de Louis XIV lors de la guerre des Camisards.
Chemins royaux – Guerre des Camisards 1702-1704
87 km – 1 journée en voiture
2 à 3 jours en vélo
Saint-Jean-du-Gard
Saint-Jean-du-Gard, Corniche des Cévennes, la Can de l’Hospitalet, Barre-des-Cévennes, Le plan-de-Fontmort, Saint-Germain-de-Calberte, Saint-Étienne-vallée-française
Cet article a été réalisé avec l’aide de Frédéric Bertho, réalisateur de la vidéo sur “La révolte des camisards, une guerre médiatisée” sur la chaîne YouTube “Ces portes qui donnent”.
Ce circuit emprunte les voies royales au cœur des événements de la guerre des camisards, véritable guérilla décentralisée menée par les paysans protestants cévenols. De 1702 à 1704, l’ensemble des Cévennes est à feu et à sang et les troupes royales doivent brûler toute la région pour en venir à bout. Dans un premier temps, nous présentons cette carte de Nolin 1703 qui a permis de suivre ces événements dans toute l’Europe.
Le contexte politique de la carte de Nolin
Suite à la Révocation de l’édit de Nantes en 1685, Louis XIV fait fortifier les villes des Cévennes pour surveiller la région et tenir ses troupes en sécurité contre d’éventuelles insurrections de protestants. Son intendant de Basville fait réaliser en Cévennes, 22 chemins royaux, assez larges pour « que l’on puisse mener du canon partout ». Cela n’empêche pas la révolte des protestants contre le pouvoir royal, « la guerre des Camisards » qui sévit de 1702 à 1704. La carte des chemins royaux, dont il existe plusieurs versions, a servi de carte d’État – Major aux militaires de Louis XIV pour réprimer l’insurrection. Ce document médiatique, largement publié dans les pays réformés, a permis de suivre les événements de la « guerre des Camisards » et de faire connaître les Cévennes dans tous les pays européens réformés comme la Suisse, les Pays-bas, l’Allemagne ou l’Angleterre.
La carte originale des chemins royaux
Fin 1697, l’intendant de Basville fait réaliser une carte des chemins royaux des Cévennes et du Vivarais. Cette carte manuscrite, à l’échelle 1/440 000, accompagne ses mémoires sur la province du Languedoc. Elle distingue les grands chemins royaux de 20 pas, en rose, des chemins de traverse de 10 pas, en jaune. Le relief est lavé à l’encre de Chine, les paroisses et les villes sont dessinées en carmin et les cours d’eau en vert. François de Dainville, historien de la cartographie, attribue cette carte anonyme à Henri Gautier, ingénieur du Roy originaire de Nîmes et huguenot reconverti. En effet, Henri Gautier dédicace son Traité de la construction des chemins (1693) à l’intendant de Basville qui le nomme inspecteur des travaux en 1695, date de la réalisation des grands chemins royaux en Cévennes et en Languedoc. D’autre part, en 1698, Nolin publie la carte du « diocèse de Nismes » réalisée par Gautier, qui sera reprise dans la fameuse carte de Nolin de 1703. Il est donc fort probable que la carte originale des chemins royaux, reprise par Nolin en 1703, soit réalisée par cet ingénieur cartographe.
La carte de Nolin 1703
En 1703, une carte des chemins royaux des Cévennes probablement reprise d’après celle attribuée à Henri Gautier, est publiée par Nolin, imprimeur et géographe du Roy. Cette carte est éditée sous deux versions. L’une est ornée d’un dessin représentant les miquelets à l’affut des camisards, parle des « mécontents » et indique « faicts par l’ordre du Roy ». La seconde évoque des « fanatiques », ne possède pas l’illustration et indique « levée par ordre du Roy de France ». Selon Philippe Joutard, les cartes seraient vraisemblablement contemporaines, celle des « mécontents » s’adressant aux protestants d’Europe tandis que celle des « fanatiques » concernerait le camp opposé, celui du pouvoir royal catholique.
Ces cartes des Cévennes ont été éditées sous des versions diverses, en France ou à l’étranger, notamment dans les Pays-Bas ou en Angleterre. Elles ont permis de suivre les événements, d’affirmer l’identité cévenole et de faire connaître cette région reculée de France dans de nombreux pays réformés d’Europe.
Bibliographie des cartes et ouvrages cités dans l'article
- Carte anonyme dont la minute fut probablement effectuée par Henri Gautier. Arsenal (BNF), Paris, Ms. 3620, p. 194. 0,277 * 0, 480 m, échelle : 130 mm = 10 l. de 3000 t.
- Diocèse de Nismes dressé nouvellement sur les lieux. par le Sr. Gautier Architecte et Ingénieur de la Province de Languedoc dédié à Monseigneur Esprit Fléchier, Évèque de Nismes. Carte est gravée et publiée chez Jean-Baptiste Nolin (1657-1708) à Paris en 1698. Carte en noir et vert, 620 x 460 c.
- Traité de la construction des chemins : Henri Gautier — 1693 — « Où il est parlé de ceux des Romains, & de ceux des Modernes, de leur figure, de leur matière, & de leur disposition dans toute sorte de lieux. Avec une dissertation sur la conduite des mâts, sur les routes à faire pour leur débuchage “ à Toulouse, chez J. Dominique Camusat. 1693, in-12o, 122.
- NOLIN (J.B.) – 1ere édition – (non datée – entre 1798-1703) – « Les montagnes de Sévennes dans le Languedoc et les plaines des environs d’où les mécontents font leurs courses, avec les grands chemins royaux faits par ordre du Roy pour rendre ces montagnes praticables sous les soins de M. de Basville, intendant de Languedoc, dessinée sur les lieux », à Paris, s.d. au 1/90 000 environ. Bib. Nat. Ge CC, 1322, 50, publiée à Paris par Nolin, dessinée probablement par Henri Gautier.
- NOLIN (J.B.) – 2nd édition – 1703 – Les montagnes de Sévennes où se retirent les fanatiques de Languedoc et les plaines des environs où ils font leurs courses, dessinée sur les lieux. Bib. Nat., GE CC 1 007, 47.
La corniche des Cévennes
Cette magnifique route de crêtes, aménagée en chemin royal par l’intendant de Basville, est l’une des artères principales des Cévennes et permet de relier les contreforts cévenols aux hautes terres lozériennes en passant par la Can de l’Hospitalet qui longe la vallée du Tarnon. Sa position est stratégique, car elle sépare et surplombe la vallée Borgne au sud, de la vallée Française au nord, au cœur des combats durant la guerre des camisards (1702-1704). En vallée Borgne, on notera l’attaque de Saint-André-de-Valborgne par 700 camisards dans la nuit du 25 au 26 janvier 1703. En vallée Française, l’église de Notre-Dame-de-Valfrancesque fut brulée en janvier 1703 et l’on retiendra l’attaque de Témélac, le 22 octobre 1702, où une douzaine de camisards furent tués par les troupes royales et décapités.
La can de l’Hospitalet
La Can de l’Hospitalet fut le lieu des prémisses d’un soulèvement des protestants dès 1689 contre le pouvoir royal. Installés près de la Corniche des Cévennes, les prédicants François Vivent et Claude Brousson souhaitent rassembler sur le mont Lozère les résistants protestants des Cévennes et du Vivarais. Dans la nuit du 23 au 24 septembre 1689, dans le « devois rocheux » qui jouxte la ferme de l’Hospitalet, François Vivent doit donner les instructions pour organiser la résistance devant une centaine de Cévenols, la plupart prédicants. Le lendemain, après avoir libéré une quarantaine d’entre eux arrêtés par les miliciens, ils descendent sur Florac, où la population est terrifiée, pensant être assaillie par au moins 4000 hommes. Ce soulèvement ne connait pas plus de développement, mais montre l’esprit de révolte qui anime les Cévennes et qui est à l’origine de la construction des chemins royaux destinés à réprimer toute rébellion.
Barre-des-Cévennes
Barre-des-Cévennes est un des lieux clés où se déclencha la Guerre des camisards. Le 22 juillet 1702, à la foire de la Magdeleine, l’abbé du Chayla est interpellé pour qu’il libère les prisonniers protestants détenus au Pont-de-Montvert. Suite à son refus, une assemblée se réunit près de St-Julien-d’Arpaon et décide de l’attaque et de l’assassinat de l’abbé du Chayla la nuit du 24 juillet au Pont-de-Montvert, événement qui a déclenché la guerre des camisards. Durant cette période, Barre-des-Cévennes fut un élément essentiel de la surveillance et de la répression mise en place par Basville pour réprimer la révolte camisarde.
Le plan de Fontmort
Sur la route de Saint-Germain-de-Calberte, le plan de Fontmort fut le site de trois combats durant la guerre des camisards, dont la première défaite des camisards, le 28 juillet 1702, 4 jours après l’assassinat de l’abbé du Chayla. La deuxième bataille d’envergure eut lieu le 13 mai 1704 où 500 camisards prirent en embuscade les troupes royales, composées de 300 hommes, qui escortaient le Comte de Tournon entre Florac et St-Jean-du-Gard. Au plan de Fontmort, un obélisque commémore le centenaire de l’Édit de Tolérance signé en 1787, qui autorise la religion réformée. La piste du plan de Fontmort vers Saint-Germain-de-Calberte est un bel exemple d’aménagement d’un chemin royal, agrandi par une taille dans le rocher et soutenu par des murs en pierre sèche de grande qualité. Il est bordé d’une rigole construite en pierre de lauze pour l’évacuation des eaux de pluies. Sur la route de Saint-Germain-de-Calberte, au Mazel Rosade, habitait le chef camisard Jacques Couderc dit « La Fleur » qui a levé une troupe très active dans le secteur.
Saint-Germain-de-Calberte
C’est à Saint-Germain-de-Calberte que l’abbé du Chayla s’est installé dès 1686, chargé par l’intendant de Basville d’œuvrer par tous les moyens à la reconversion des protestants. Considéré comme un persécuteur par la population cévenole, il est tué au Pont-de-Monvert par des rebelles protestants, après avoir refusé de libérer des prisonniers. Cet événement marque le début de la guerre des camisards. Durant toute cette période, le village dispose d’une importante garnison de troupes royales ce qui n’empêcha pas une attaque dans la nuit du 31 décembre 1702 par 300 camisards. L’attaque contre le village barricadé échoue et l’église est épargnée.
Saint-Étienne-Vallée-Française
Toute l’année 1703, les camisards tiennent les vallées cévenoles et ne peuvent être délogés par les troupes du roi. Le commandant en chef Montrevel décide alors de détruire tous les hameaux, mais ne parvenant pas à démolir les maisons, il ordonne à l’automne 1703 « le grand brûlement » de toute la région, soit 31 paroisses, 466 bourgs, villages et hameaux. Les habitants sont enfermés dans les villages pendant que les hameaux et la nature alentour sont brûlés. Un document permet de suivre la route suivie par les soldats chargés de détruire la paroisse de St-Étienne-Vallée-Française : Pont de Burgen, Mas Amalric, Espinassous, Serres, les Abrits, Les Longagnes, la combe d’Avelac, la Fregeyre, le Cambonnet et les Passadoires.
Saint-Jean-du-Gard
Avant Saint-Jean-du-Gard, près de Falguières, la maison de naissance du chef Camisard Abraham Mazel qui participa à l’assassinat de l’abbé du Chayla a été rachetée et restaurée par l’association culturelle à but non lucratif « Abraham Mazel », consacrée aux luttes et résistances en Cévennes et dans le monde.
En octobre 1702, après la bataille de Témélac en vallée Française, la troupe royale rentre sur Barre-des-Cévennes, puis sur Saint-Jean-du-Gard portant à leur baïonnette l’une des têtes des révoltés protestants. Cette image illustre la violence des combats qui ont embrasé les Cévennes. Les chemins royaux construits par Basville à travers les Cévennes pour anticiper toute rébellion n’ont pas pu éviter cette révolte dont les soubresauts ont perduré jusqu’en 1710 et qui ont marqué à jamais l’identité de cette région.
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La révolte des Camisards, une guerre médiatisée
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